Propriétés laxatives du pain d’épices : mythe ou réalité ?
Gertwiller, capitale du pain d’épices
Le pain d’épices est une pâtisserie savoureuse qui a traversé les siècles et les continents. Il était si important dans l’alimentation qu’une corporation portait son nom. Ces communautés d’art et de métiers dont les corporations du pain d’épices ont disparu avec le temps, mais le savoir-faire a été transmis aux générations suivantes. Quelle est l’origine du pain d’épices et comment est née la corporation du pain d’épice ? Quels sont les changements que cette pâtisserie a connus en matière de composition et de préparation ? Voici tout ce qu’il faut savoir à ce sujet.
Des fêtes d'Artemis aux corporations du pain d'épices
Le pain d’épices est né d’un pain de miel qui existait depuis l’Antiquité. Il était appelé « melitounta » et il était toujours préparé à l’occasion des fêtes d’Artémis. C’était l’occasion de vénérer la déesse de la chasse, de la nature sauvage et des accouchements. Ce gâteau contenait principalement de la farine, du sésame et du miel. On pouvait parfois y ajouter des œufs et du fromage. C’était donc un mélange de sucré et de salé.
À partir du 1er siècle, des épices ont commencé à être introduites dans la pâte. Cette nouvelle façon de préparer le pain au miel fut une idée du célèbre et riche romain Caelius Apicius, un cuisinier et gastronome. Il utilisait comme ingrédients supplémentaires du thym, des noix, du safran ou encore des raisins secs. Avec le temps se sont ajoutées des épices relevées comme le poivre, le gingembre, l’anis et le girofle.
Pour mieux comprendre les origines du pain d’épices, il faut également s’intéresser à la Chine. Au Xe siècle, certaines contrées consommaient un pain fait avec de la farine de froment et du miel. On pouvait y ajouter des plantes aromatiques ou non. Ce gâteau était appelé le « Mi Kong » et il représentait la nourriture principale des soldats de Gengis-Khan. Durant les Croisades qui ont eu lieu en Orient, les Croisés (des Francs) ont beaucoup consommé ce pain de miel. Il leur aurait permis de survivre lors de la traversée des terres arides de Roumanie. À partir de cette période, ce gâteau va se répandre dans tout l’Occident et dans la plupart des pays de l’Est.
Comment est née la corporation du pain d'épices ?
La corporation du pain d’épices est née vers la fin du XVIe siècle. Avant cela, il existait celle des « boulangers en pain d’épices » qui a permis à la recette de Saint Grégoire de Nicopolis d’être maintenue vivante pendant longtemps. C’est la toute première méthode de préparation qui a été connue en France. Ce gâteau était tellement apprécié par la haute société que le roi a voté une législation pour l’encadrer.
Pour le choix des produits et la préparation, les boulangers devaient suivre une démarche stricte. Le miel à incorporer dans la pâte devait être de très bonne qualité, puisqu’il représente l’ingrédient principal de cette pâtisserie. Des jurés surveillaient par ailleurs le bon fonctionnement de la profession. Pour intégrer la corporation du pain d’épices, il fallait suivre une formation dans une ville spécialisée dans sa fabrication.
En cas de non-respect des textes, les maîtres épiciers ou leur apprenti devaient payer une amende. Le savoir-faire autour de la recette de base a donc été transmis de cette façon pendant plusieurs années jusqu’en 1791. C’était la période post-révolutionnaire, durant laquelle l’économie et l’industrie ont retrouvé leur liberté. Les dirigeants ont alors voté plusieurs lois qui ont conduit à la disparition des corporations. L’une d’elles, votée en mars de la même année, a instauré un système de patente et a aboli les communautés d’arts. Une autre a été votée en juin, nommée la loi Le Chapelier. Elle a interdit les associations ouvrières et les coalitions de citoyens de même profession.
Quelles sont les évolutions dans les corporations?
Saint Grégoire de Nicopolis était Arménien. Il a quitté son terroir au Xe siècle pour se réfugier à Pithiviers dans la région Centre-Val de Loire. Il y a vécu pendant plusieurs années et offrait à ses visiteurs du pain fait de miel et d’épices. Depuis lors, de nombreuses évolutions sont apparues dans la préparation du pain d’épices.
Les changements effectués dans la préparation du pain d'épices
Durant plusieurs années, la recette de Saint Grégoire de Nicopolis a été conservée grâce à la corporation et aux règles qui étaient mises en place. Dès la fin des communautés d’arts et de métiers, la technique de préparation a néanmoins commencé à connaître des changements. Une grande variété de ce gâteau est alors proposée aux consommateurs. Parmi elles, on retrouve la forme du pain d’épices qui est aujourd’hui commercialisé dans certaines pâtisseries et boulangeries.
Durant les XVII et XVIIIe siècles, les épices les plus relevées telles que le poivre, l’anis, le gingembre, le girofle, la cannelle et la coriandre ont été abandonnées. Elles ont été remplacées par des écorces d’amandes, d’agrumes, de dragées et de pistaches. Des fruits confits ont même été ajoutés à la recette au cours du XIXe siècle. Le goût salé a donc totalement disparu pour laisser place uniquement à celui sucré. Le prix du miel a également augmenté durant cette période et a été remplacé par la mélasse, une matière sucrante vendue à bas prix. Certains boulangers utilisaient par ailleurs de la potasse en guise de levure afin d’obtenir une pâte plus moelleuse.
Une dernière législation pour contrôler les changements dans la préparation
Au XXe siècle, une loi a été adoptée pour interdire l’utilisation de certains ingrédients qui peuvent être dangereux pour la santé. Si ce pain a pendant longtemps eu une bonne réputation, c’est en partie grâce aux épices qu’il contient. Elles apportent en effet de nombreux bienfaits à l’organisme. Le médecin d’Henri IV le qualifiait de « pain de santé » et il a listé les ingrédients miracles qui devaient le composer. Parmi eux, on retrouve :
- le miel cuit,
- la farine,
- la cannelle,
- le poivre,
- le gingembre,
- le girofle.
Cette composition est celle qui a été la plus utilisée dans les différentes villes, notamment à Reims, qui était spécialisée dans la préparation de ce gâteau. Dijon est également devenue célèbre avec son pain d’épices à base de farine de froment (farine de blé et miel). Aujourd’hui encore, on peut déceler la trace de certains ingrédients dans le nom donné au pain d’épices dans certains pays. Certaines langues retiennent la présence du gingembre, tandis que d’autres se focalisent sur le poivre ou le miel. En Angleterre, par exemple, il est appelé « gingerbread ». En danois, c’est le « peberkage » et en Espagne, « pan de jengibre ».
La disparition des corporations du pain d'épices
Malgré la disparition des corporations du pain d’épices, la technique pour sa préparation est restée presque identique à la recette de base. Certains fabricants ont en effet continué à perpétuer la tradition et à transmettre ce savoir-faire à d’autres générations. C’est ce qui permet de trouver encore aujourd’hui des pains d’épices qui ont le goût des gâteaux d’antan. De nombreux pâtissiers apportent toutefois leur touche personnelle pour se démarquer des autres professionnels. Dans les villes comme Reims, Dijon et Vesoul, il continue d’être apprécié par les petits et les grands. Il est d’ailleurs préparé en grande quantité lors de la fête de la Sainte-Catherine, célébrée chaque 25 novembre. On lui donne la forme de cochonnets qui ont un sifflet à la place de la queue.
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- GONDOLLE, Sophie. Le pain d’épice, une histoire multiculturelle. RILEA, 2022.
- « Historique des fabricants de pains d’épices », Exposition universelle internationale de 1900 à Paris, Rapport du jury international, groupe X, alimentation, Première partie, classes 53-59, Paris, 1902, in 4°, p. 260-263.
- LESPINASSE René de, Les métiers et corporations de la ville de Paris, Paris 1886, in 4°, tI, p. 338-406.